Le baromètre est au beau fixe. Il n’y a pas de nuage durant la journée. Les girouettes indiquent que l’air vient du nord. Il fait chaud mais on respire. La nuit est relativement froide. Coup du soir bref et tôt dans la soirée, avant que la fraîcheur ne fasse lever l’humidité dans la vallée.
Il fait encore beau. Le baromètre reste au beau fixe malgré une légère descente en cours d’après midi suivie d’une remontée le soir. Il se développe des nuages de beau temps, cumulus blancs se trouvant en sommet de courants ascendants que connaissent bien les amateurs de vol à voile. Il n’y a pas de vent et l’air ne vient pas du nord.Coup du soir assuré. Avec un peu de chance, c’est un de ces moments privilégiés où les truites perdent toute méfiance.
Le baromètre baisse assez vite. (les variations rapides aussi bien vers le haut que vers le bas du baromètre ne valent rien) Les cumulus se transforment en strato-cumulus, à la base sombre épaisse,
avec des colonnes blanches qui montent très haut dans le ciel. Le soir ces nuages se rassemblent à l’horizon et ressemblent un peu aux volutes des tableaux de Van Gogh à la fin de sa vie. C’est le signe évident qu’il va faire orage. Il s’agit là d’un phénomène local qui conditionne l’activité des truites partout où il passe.
S’il doit faire orage dans la nuit, il fait chaud, lourd, l’air est brûlant après le soleil, l’ombre continue de peser, on sue sans bouger. Il n’y a pas de coups du soir. A la limite,en début juin, le moucheur peut exploiter cette situation sur les postes à insectes, mais le soir,les poissons qui attendent la pluie restent cachés. Dans le cas où l’orage ne passe pas dans la nuit, il y a généralement un bon coup du matin, du lever du jour jusqu’à ce que le soleil tape directement sur l’eau.
Le baromètre baisse lentement. Les cumulus de beau temps disparaissent dès que le soir arrive. Il s’effritent, s’effilochent dès que l’ascendance qui leur a donné naissance disparaît. Cette situation permet de prévoir une perturbation à long terme. Il se peut qu’apparaissent les premiers cirrus, nuages en forme de teintures. Les traînées blanches des avions à réaction s’épaississent et ne disparaissent pas. Il va pleuvoir dans quelques jours. Si l’eau est à un niveau moyen au début de cette situation, c’est extrêmement favorable. Dès que les cirrus se transforment en nuages plus épais et que l’imminence de la pluie se précise, les truites retournent dans leurs cachettes.
Après une perturbation, lorsque le baromètre remonte lentement, qu’il a amorcé cette montée alors qu’il pleuvait encore, que les eaux bien qu’un peu fortes ne sont pas teintées, et qu’il recommence à faire chaud durant la journée (le soleil n’apparaissant qu’épisodiquement) il faut tenter sa chance.coup du soir assez bon, démarrant tôt et pouvant durer assez tard si le soleil a temps de chauffer.
S’il pleut, une pluie fine, installée, que le baromètre n’est pas à tempête mais se maintient assez bas, on ne peut pas parler de coup du soir car la pêche est souvent favorable tout au long de la journée. Il ne faut jamais hésiter à pêcher à la mouche ces jours d’été que détestent les estivants, c’est-à-dire frais pour la saison et gris. Si le soleil sort le soir, cela peut signifier qu’il va faire beau dans le cas où le baromètre amorce sa remontée. Coup du soir assuré, à exploiter en sèche par brèves périodes, favorables et en nymphes le reste du temps. Si le baromètre ne remonte pas cela signifie qu’il va pleuvoir dans la nuit et les truites cessent toute activité alimentaire dès que le soleil apparaît.
On dit que l’éclaircie du soir ne plaît qu’aux innocents.
Il n’y pas de coup du soir. Lorsque le vent souffle avec force quelle que soit son orientation. Après une pluie lorsque les eaux sont trop fortes et teintées. Après une longue période de chaleur et que les eaux sont trop basses, comme au mois d’août. Par brusque baisse des eaux. Lorsqu’il va faire orage la nuit. Lorsque la pluie est annoncée par les nuages fins et les traînées d’avions persistent et s’épaississent. Lorsque les températures sont en dessous de la moyenne saisonnière.
Le coup du soir n’est pas un sauve bredouille mais un grand moment auquel le moucheur rêve une partie de l’année.
Lionel Arnaud